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Par Alain Bagnoud le 13 Mai 2007 à 09:55
Les choses chez Proust n'ont pas toujours leur couleur « naturelle ». Le clocher de Combray n'est pas gris, mais rose, rougeâtre, violet, pourpre, selon les moments du jour et la lumière qui le baigne. C'est un renouvellement de la vision par les couleurs de l'impressionnisme.
La scène par exemple où le narrateur voit pour la première fois Gilberte Swann dans le parc est composée comme un tableau : fleurs autour de la fillette, perspective de l'allée, et cette vision de la petite fille sur le visage de laquelle il y a des ombres roses. Ou, plus loin lors de la même promenade, la descriptions des nymphéas qui rappellent évidemment ceux de Monet. Ou, sur le toit de la cabane de jardinier qui se trouve près de l'étang de la maison de Vinteuil, les tuiles qui font dans la mare une marbrure rose.
Ces effets ne constituent pas des effets artificiels surajoutés mais sont au service d'une vision et servent au développement du texte. Par exemple, c'est parce qu'il a voulu revoir cet effet de couleur que le narrateur s'endort sur le talus devant la fenêtre de Mademoiselle Vinteuil et assiste à la fameuse scène de sadisme, lorsqu'elle demande à son amie de profaner l'image de son père mort en crachant sur son portrait.
Tout Combray est ainsi, me semble-t-il, influencé par l'impressionnisme, et plus particulièrement par Monet.
Ce qui va changer plus tard. Je me rappelle avoir été frappé, pendant mes études d'histoire de l'art, en voyant le tableau de Duchamp, Le nu descendant l'escalier, qui m'a rappelé la description de Saint-Loup descendant l'escalier d'une maison de passe. Mais là comme pour l'impressionnisme, c'est manifestement la peinture qui a influencé le texte.
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