• Marina Salzmann, Safran

    Marina Salzmann, SafranAprès Entre deux, qui avait attiré l'attention, suscité un débat sur l'écriture féminine et reçu le prix Terra Nova en 2013, Marina Salzmann revient avec un autre recueil de nouvelles personnelles aux ambiances étranges, Safran.

     

    Ses personnages sont des marginaux intégrés, rêveurs, décalés, blessés et poétiques. Quand il s'agit de femmes, elles sont fragiles, ont des tours de langage enfantins et une vision magique de l'existence. Elles cultivent leur étrangeté, leur rien d'excentricité, se laissent habiter par une folie douce, entre magie de conte de fée, perceptions extra-sensorielles et paranoïa.

     

    Le monde tout autour est menaçant, avec un petit côté futuriste et concentrationnaire. Chantiers envahissants, sonores, bruyants, surveillance GPS, atmosphère d'après catastrophe. Perte de sens aussi : « On ne peut que constater que les mots se sont terriblement éloignés des choses. »

     

    Ces textes intègrent des chats, une poule, un cochon et des musiciens. On y trouve aussi des récits de voyages, des événements quotidiens, des descriptions ou des évocations qui semblent autobiographiques, comme celle d'une grand-mère racontée par une narratrice.

     

    Mais ce ne sont pas des nouvelles traditionnelles, dont on sait qu'une construction rigoureuse, encadrMarina Salzmann, Safranée, est considérée comme une des vertus cardinales. Quand l'auteur tente de suivre un canevas plus classique ou plus convenu, en recherchant des effets, cela me semble moins réussi (l'histoire de celui qui congèle sa mère morte pour continuer à toucher sa retraite).

     

    Je préfère les textes où Marina Salzmann procède par glissements, digressions, retours. Cette méthode dans laquelle elle est excelle ne nuit pas à l'unité, qui est du ton, de la personnalité, du regard un peu décalé et qui cherche à se surprendre.

     



     

    Marina Salzmann, Safran, Editions Bernard Campiche