• Les Goncourt et Nabe

    Bien sûr, les Goncourt  (voir aussi ici et ici) avaient des côtés un peu agaçants. Vieux garçons, misogynes, réactionnaires, fiers de leur particule très récente et de leur noblesse qui ne valait rien. Antisémites même. Ça se voit en tout cas chez Edmond : j'en suis au moment, dans son journal, où il rencontre Drumont. Quand même, ils ont été les fondateurs du naturalismeEdmond de Goncourt par Angel Pons et ils ont inventé l'écriture artiste, à grands renfort de formules étonnantes et de mots rares, choisis, précieux.
    C'est  cette écriture qui fait l'intérêt de leur journal. Cette écriture et leur côté commère, langue de serpent.
    Edmond en avait publié quelques passages de son vivant, ça avait marché très fort. Il faisait ce que Marc-Edouard Nabe a fait aussi un siècle plus tard : tout dire, tout rapporter, comme un enregistreur - mais avec du style. Les rencontres d'écrivains et de peintres des frères, leurs bibelotages, leurs visites à la princesse Mathilde, la petite-nièce de Napoléon.
    Taine, Renan ont poussé des cris d'orfraie en voyant leurs conversations de fin de banquet ainsi révélées, qui les montraient sous un air pas toujours reluisant. Ils n'ont pas été les seuls à râler. Edmond a provoqué bien des protestations, il a suscité des haines.
    C'était un peu un précurseur. Il faisait dans le people, mais les people de l'époque n'en étaient pas encore à révéler leur vie privée. Plutôt à sculpter leur statue. Ça a bien changé, eh oui, vous avez raison, ma bonne dame !