• Le silence des intellectuels

    29 % pour l'UDC. Le Schweizerische Volkspartei. Presque un Suisse sur trois a voté pour le parti nationaliste qui organise le culte du chef, qui prône la haine de l'étranger, qui utilise Affiche de l'UDC, reprise par le parti néonazi allemand NPDtoutes les ficelles du populisme. Qui fait des amalgames douteux, qui simplifie à outrance, qui, caché derrière sa propagande xénophobe, défend les puissances économiques. Il a dépensé 20 fois plus pour sa dernière campagne que son adversaire direct, le parti socialiste, deuxième en importance. De l'argent dont on ne connaît pas la source !
    En face, des partis en déliquescence, sonnés parce qu'ils ne reconnaissent plus les règles du jeu. Leur ancien partenaire les a modifiées en cours de partie sans qu'ils s'en aperçoivent. Ils protestent :
    - C'est faux ! On ne doit pas ! Ce sont des méthodes de voyous !
    Ils s'indignent. Ils ont raison. Ça ne change rien.
    Et puis il y a nous. Les intellectuels. Empruntés, embêtés. Au-dessus de la mêlée. La bouche en cul de poule :
    - Oui, bien sûr, nous n'aimons pas ces idées et ces gens. Mais leur parti est en définitive démocratique. Il respecte les institutions.
    - On ne peut pas aller contre le peuple. Il faut admettre ses choix.
    - Toutes les opinions sont bonnes à dire, ça donne de l'ardeur au jeu politique.
    - Ne simplifions pas, la situation est complexe.
    Ou, encore plus lâche (je l'ai entendu il y a trois jours) :
    - Je n'arrive plus à me définir, je ne vote pas, il n'y a plus d'idéologie. (Sic !)
    Mais quand on nous interroge sur ce que nous aurions fait dans les années trente en Allemagne ou en Italie, il n'y a aucun doute. La main sur le cœur ! Nous aurions résisté ! Nous nous serions fait entendre ! Grâce à nous, le fascisme n'aurait pas passé !
    Tout serait donc une question de conditionnel passé ? Et si on replaçait les choses au présent ? Si on se remettait à expliquer, à parler ? A prendre position ? A avoir un peu de courage ?
    Parce que, décidément, il y a urgence !

    (Publié aussi dans Blogres)