• Le blues des vocations éphémères

    Les rues deviennent anachroniques vers la vieille ville dont la cathédrale, tout en haut, ressemble à un phare au-dessus de la rade. Plus loin, un grand supermarché a placé sur sa façade la fresque d'un peintre national et une citation de Jean-Jacques Rousseau. « Mon père en m'embrassant fut saisi d'un tressaillement que je crois sentir et partager encore: Jean-Jacques - me dit-il - aime ton pays. »

    Avant d'arriver à la gare, je m'arrête devant un rectangle en verre, moderne, ses façades complètement recouvertes de grosses vitres en miroir. Cet immeuble est un symbole pour moi, à cause de son image de petit gratte-ciel qui m'a frappé, la première fois que je suis arrivé de mon village pour visiter la cage à lapin.

    Les voitures bouchonnaient dans le tumulte de la rue. Le soleil se reflétait sur leur pare-brise. Dans la cohue, des filles, jolies, séductrices, marchaient en regardant droit devant elles, pleines de l’effet qu’elles produisaient.

    Les passants me bousculaient. J'hésitais à m’engager dans le flux qui semblait devoir m’entraîner comme une branche sans volonté dans une rivière. Tout m'éblouissait, le paysage urbain, les gens, les immeubles, la place. Le bâtiment entièrement vitré était comme un message, une promesse.

    Cette fois, oui, cette fois, j'y étais!


    Extrait de Le Blues des vocations éphémères,

    à paraître aux Editions de L'Aire le 13 octobre