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Jacques Tornay
Néanmoins
Il faut se rendre aux mots dans un contentement chantonné
les lèvres mi-closes, sans brusquerie,
être à soi-même comme le chat assis sous le pommier.
Suivre le glissement de la lune et ne se préoccuper de rien d'autre.
Mais la sérénité est un continent inabordable,
un train qui n'arrive pas, un messie en panne, et nous restons
debout à des carrefours encombrés de questions imprécises et
de réponses improbables, en peine de choisir.
Nous avons néanmoins une candeur immense à investir
du même élan, du même allant qu'à l'époque où nous étions
petits.
Nous sommes des conglomérats de molécules sacralisés par
l'espoir d'une éclaircie,
des rêveurs de promesses démurées.
Nous saluons d'une main le soleil bifurquant derrière l'épaule
de la montagne et de l'autre accueillons la nuit comme une soeur.
Chaque parole nous sert de sésame. Aucun geste n'est dérisoire.
Le moindre fragment d'une existence vaut d'être repris
et consigné sous la forme d'une perle rare
Nous distinguons désormais les moments trempés d'absolu
qui nous sont offerts.
Pour commencer, ne fermons plus les cercles que nous traçons
sur le papier, la plage, l'espace aérien et n'importe où.
Jacques Tornay
(Tiré du recueil Feuilles de présence, L'Arrière-Pays 2005. Chez Josette Ségura, 1 rue Bennwihr, 32360 Jégun, France, ou dans les librairies de la Fnac.)
Tags : Littérature, tornay, poesie, valaisanne