• J.M. Coetzee, Elisabeth Costello

    J.M.coetzee

    J’avais déjà rencontré Elisabeth Costello dans un roman ultérieur de Coetze où elle apparaissait en tant que personnage secondaire : L'homme ralenti. Ici, elle est l’héroïne principale du roman éponyme. Un personnage qui produit sur son fils le même effet qu’on peut généraliser : « Elle l’ébranle ; c’est probablement l’effet qu’elle produit sur d’autres lectCoetzeeurs également. C’est probablement la raison pour laquelle, en ce monde, elle existe. »
    Ebranlé, on l’est en effet à accompagner cette romancière vieillissante connue pour avoir publié des années plus tôt un livre sur Molly Bloom, l’héroïne de Joyce. On la suit à l’occasion de huit discours qu’elle prononce dans des colloques, des conférences, ou à propos de prix qu’elle reçoit.
    Jusqu’à la scène finale, une fable où Costello, pour franchir une porte vers l’au-delà, doit expliquer ses croyances, et affirme que l’écrivain n’en a pas, ne doit pas en avoir, qu’elles sont gênantes pour lui. Qu’il doit être un secrétaire de l’invisible, à l’écoute des voix qui lui parviennent. Toutes les voix, autant celles des victimes de des bourreaux. (Et au-dessus d'elles: la voix détachée, cruelle, impitoyable et sensible à la fois de Coetze.)
    Chaque discours est l’occasion de nous faire part d’opinions tranchées. Elisabeth Costello compare les abattoirs d’animaux aux camps de la mort d’Auschwitz. Questionne l’oralité du roman en Afrique et son statut. Se pose des questions sur le réalisme, le pouvoir de l’écriture, la mort.
    Tout ça fait un livre étrange, ironique, fort, dérangeant, qui s’interroge sur les pouvoirs de l’écriture littéraire.

    J.M. Coetzee, Elisabeth Costello, Seuil