• Ilona vient avec la pluie, par Alvaro Mutis

    Qu'est-ce que c'est que la mémoire ! J'ai lu d'autres livres d'Alvaro Mutis. Deux il me semble. Je me souviens de son personnage récurrent, Maqroll le gabier, qui exploitait une mine dans les montagnes, avec une femme dont la sexualité étrange se limitait à la sodomie. Elle finissait, à demi-folle (rien à voir avec ce goût) et tentait de le tuer.
    Mais impossible de me souvenir du titre de ce texte. J'ai trouvé sur internet la liste des romans de Mutis, mais pas leur résumé. Ce qui ne me permet pas non plus de vérifier si mes souvenirs sont exacts. Alvaro Mutis
    Enfin, je suis bien sûr, par contre, d'avoir lu Ilona vient avec la pluie, puisque je l'ai à côté de moi et que je viens de le terminer.
    Maqroll, éternel errant, est à Panama. Echoué là après que le bateau sur lequel il naviguait a été saisi par les banques et que le capitaine, son ami, s'est suicidé d'une balle dans la tempe. Le temps passe et Maqroll s'englue dans la ville. Tout se délite. Il dépense son argent, accepte une revente d'objets volés pour s'en sortir, est repéré par la police.
    Alors que tout semble désespéré, il retrouve Ilona, une ancienne complice et maîtresse. Armés de son argent, ils errent dans les bars entre divers alcools et siestes amoureuses. Finalement, pour lutter contre l'épuisement de leurs ressources, ils montent un bordel un peu particulier où les filles se font passer pour des hôtesses de l'air. Tout marche bien jusqu'à l'arrivée de Larissa. Une superbe fille désespérée, sorte de double sombre d'Ilona, et qui va l'envoûter, l'entraîner vers la tragédie. Elle vit dans la carcasse d'un navire échoué où elle avait noué des relations avec des morts. Ou, disons, des hommes d'une autre époque, surgis du passé.
    Un thème récurrent chez Mutis, qui médite souvent sur l'histoire et les moments qui auraient pu changer la face du monde. Mais ici, cette irruption du passé amène une fin tragique.
    Ca pourrait être un roman d'aventures. C'en est un. Mais par le regard détaché qu'il porte sur les choses, Maqroll déborde le sujet de ses entreprises. « Tout est égal, songe-t-il, tout revient au même. Ce qui n'est pas égal, c'est ce que nous portons en nous, cette folle hélice qui ne s'arrête jamais. Voilà le secret, voilà ce qui ne doit jamais tomber en panne . »
    Son regard détaché et transcendant va plus loin que la surface, jusqu'au cœur des choses. Si bien que le récit, finalement, prend des qualités de mystère, de gravité et de magie désenchantée qui en font une chose belle, triste et profonde.