• La Confrontation, par Angel Corredera

    Après avoir aimé le dernier livre d'Angel Corredera, Derniers Rites (voir ici), on ne pouvait pas moins faire qu'aller voir du côté de son opus précédent, qui était le premier de ses romans publiés.  La Confrontation.
    Entre temps, j'avais rencontré l'auteur, au salon du livre de Genève. Lors Angel Correderadu cocktail organisé par Michel Moret autour du recueil Rencontre, publié à l'occasion des 30 ans des Editions de l'Aire (voir ici) et auquel nous avons collaboré, Corredera et moi.
    Une rencontre qui a provoqué une surprise de taille. C'est le cas de le dire. Parce qu'Angel Corredera est grand. Sur les impressions que m'avaient faites ses photos, son nom, ses textes, l'année de sa naissance, je ne sais pas moi, les nuages dans le ciel, sur tous ces indices infaillibles, je l'imaginais plutôt petit et trapu comme un taureau. Non. Qu'on se le dise : Angel Corredera est grand et mince. Ça change tout, n'est-ce pas ? Non, ça ne change rien ? Bon.
    La Confrontation est un roman écrit à la première personne du singulier. Un activiste politique, arrêté après des plastiquages, des enlèvements, responsable de 143 morts, se raconte depuis sa cellule, évoque le passé, son quotidien, ses victimes, ou une baigneuse rencontrée dans une station balnéaire avec qui il a vécu une aventure qui tranche par sa fraîcheur et une irruption d'inattendu sur son quotidien précautionneux et calculé.
    On se trouve près d'une frontière entre deux pays, on pense évidemment à l'ETA, même si le vague des lieux, des idéologies et de l'Organisation à laquelle le héros appartient universalise le propos.
    S'il se souvient de ses actes et de ses victimes, le terroriste semble n'éprouver aucun remords. Pourtant, la motivation de ses actes est devenue floue. Il y avait au départ, pour cet enseignant, une volonté d'échapper à l'ennui et de transformer le monde, probablement. Une croyance à certains idéaux qui semble s'être usée au fil du temps, de l'action répétitive, de la solitude méfiante dans laquelle il vit, de la disparition de ses anciens camarades.
    De sorte qu'il semble avoir continué sa trajectoire meurtrière par une sorte d'automatisme inquiétant, piégé par ses actes, engagé dans une glissade absurde.
    Très contrôlé, La Confrontation est un livre réussi, à l'écriture parfaitement maîtrisée, qui recherche l'épure, la précision. C'est un texte qui privilégie un côté cérébral, contrôlé, post-universitaire, presque abstrait.
    Le livre en est un peu bridé et n'a pas l'épaisseur plus charnelle de Derniers Rites, ni sa puissance évocatrice et visuelle. Par nature, je préfère ce dernier roman, plus engagé. Un goût personnel.
    Peu importe. Quoi qu'il en soit, La Confrontation, c'est du très beau boulot. 

    Angel Corredera, La Confrontation, Editions de L'Aire