• Daniel Maggetti, La Veuve à l'enfant

    Daniel Maggetti, La Veuve à l'enfantL'image de couverture de La Veuve à l'enfant, qu'on retrouvera décrite dans le livre, montre sainte Agathe et ses seins coupés. C'est, comprend-on ensuite, une allusion à l'héroïne du livre, dont les tortures rappellent la sainte, comme cette ablation des seins évoque le lien du sang coupé entre elle et Pierino, le petit garçon qu'elle élève comme son petit-fils.

     

    La veuve à l'enfant. La vierge à l'enfant. Mais Anna Maria n'est pas vierge. Elle a été mère. Son fils a disparu. Pierino est le fils adultérin de sa belle-fille. Anna Maria l'a recueilli alors que sa mère allait l'abandonner à la porte d'une église.

     

    Anna Maria, explique l'auteur, a existé. Elle sort « d'un arbre généalogique aux branches aussi touffues que celles d'un coudrier jamais taillé ». La chronique dont elle est le sujet, évocation d'un lieu et d'une époque, a la saveur âpre d'un passé qu'on sent habiter l'auteur de manière organique. Rien d'anecdotique dans son rapport avec ses personnages : ils font partie de son histoire ou de ses légendes.

     

    Pour animer ce passé personnel, Daniel Maggetti invente un prêtre piémontais, théologien et joueur de violon, Don Tommaso. Tombé en distrâce, celui-ci est expédié dans le village perdu. Son arrivée permet de transformer la chronique en roman. C'est à travers Don Tommaso qu'on découvre les histoires et les secrets d'Anna Maria, qu'il a prise comme servante. La suite des révélations qu'il obtient sert de moteur au livre

     

    Daniel Maggetti, La Veuve à l'enfantEt des secrets, il y en a. Celui du fis disparu en Australie, mort ou ayant refait sa vie dans les jupes d'une fermière. Celui des beaux-parents d'Anna Maria et de leur auberge. Celui de son mari, surtout, dont on découvre l'étonnante vérité tout à la fin du livre.

     

    Fait de longs paragraphes denses en harmonie avec l'intensité du récit, La Veuve à l'enfant compose une fresque sombre aux destinées tragiques, imbriquées, sans oubli ni pardon. Le texte décrit une vallée qui n'oublie jamais les manquements et les entorses aux conduites et à la morale commune. Une vallée dont le seule espoir semble le départ : en ville, en Australie, à Paris, ou dans la musique du violon et la littérature qui transcende.

     

     

     

    Daniel Maggetti, La Veuve à l'enfant, Zoé