• Brasillach, la droite et le style

    Robert BrasillachUne réputation, bonne ou mauvaise, est toujours un atout. C'est à cause de la sienne, exécrable, que j'ai lu du Robert Brasillach.
    Cet écrivain né en 1909 a été fusillé après la guerre. Surtout parce qu'il a dirigé l'hebdomadaire Je suis partout pendant les années d'occupation, y prônant la haine des Juifs, la destruction des communistes et y montrant son admiration pour le IIIème Reich. Il n'était pourtant pas satisfait de la collaboration avec les nazis. Ce qu'il voulait, lui, c'était un fascisme à la française, personnel, et pas une sujétion à l'Allemagne.
    Après sa condamnation à mort, une pétition d'intellectuels n'a pas décidé le général de Gaulle à le gracier. Peut-être, a-t-on suggéré, à cause des « préférence sexuelles » de Brasillach, qui était homosexuel. Plus sûrement parce que le général devait donner des gages aux communistes, et que Brasillach était considéré comme responsable de la mort de beaucoup d'entre eux.
    Bref: réputation plus que sulfureuse. Et donc, mon intérêt pour sa prose et son style, dont on dit grand bien.
    Mon ami Antonin Moeri prétendait à une certaine époque que tous les grands stylistes étaient de droite. Il citait Céline , Chardonne, je crois, et je ne sais plus qui.
    J'ai parlé ailleurs de Paul Morand et j'ai beaucoup fréquenté Drieu La Rochelle à une époque. Tous ont du style, certes, mais encore faudrait-il s'entendre sur ce mot et ce qu'il désigne. Parce que Céline et Morand, par exemple, ce n'est pas exactement le même genre d'écriture.
    Il me semble, subjectivement, que le mot style connote quelque chose de retenu, de hautain, de contrôlé. Ce qui veut dire que Proust n'en aurait pas? Et Céline, donc?
    On ne s'en sortira pas. Mais c'est peut-être une question de vocabulaire pour désigner les bons écrivains et indiquer leur tendance politique. Dans ce cas, on dira de ceux qui se sont situés à droite qu'ils ont du style et des autres qu'ils ont une écriture. Et que le talent est indépendant de l'opinion politique.
    Ou alors, Antonin, peux-tu m'éclairer?
    (Et on parlera de Brasillach une autre fois.)