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    L'année Rousseau suit son cours. On a beaucoup vu, lu, entendu de choses de et sur Jean-Jacques. Mais il n'y a jamais trop de bonnes nourritures, n'est-ce pas ?

    Surtout si elles sont servies avec l'inventivité, la fougue, la générosité du Théâtre du Saule rieur, qui s'attaque à son tour au grand écrivain.

    Idée originale : Rousseau une promenade se passe dans le Jardin botanique et c'est itinérant. Emmené par les comédiens, le public se promène à travers le parc. Un prologue et cinq scènes dans divers décors de cet endroit merveilleux évoquent la mémoire de Rousseau, en lien avec la nature.

    Pour la pièce, qui est une création originale, Catherine Fuchs a imaginé une émission de télévision culturello-glamour, qui serait programmée pour le jubilé Rousseau. Une animatrice survoltée y confronte deux botanistes, dont le conservateur du jardin, à un écrivain à succès, habitué des plateaux télévisuels, des médias et des grands thèmes généraux. Mais l'émission ne se déroule pas tout à fait comme ses concepteurs l'avaient espéré.

    Dans ses turbulences et ses renversements, elle révèle pourtant des parentés et des analogies entre les siècles. Hier comme aujourd'hui, deux partis s'opposent, antinomie sur laquelle repose la cohérence du spectacle. D'un côté, il y a ce qu'on pourrait appeler la clique à Voltaire : des gens qui recherchent la lumière et la notoriété, qui mettent une pensée simple au service d'une philosophie clairette et n'échappent pas aux préjugés alors qu'ils affirment les combattre. De l'autre, il y a le camp de Rousseau, composé d'êtres plus dédaliens, à la pensée riche, complexe, touffue parfois au risque de devenir paradoxale, qui fuient les foules et aspirent à une vérité personnelle, sans souci de leur sécurité.

    Spectacle animé, baroque, varié, Rousseau : une promenade mêle les thèmes profonds chers à Rousseau (la botanique, Dieu, la nature, la littérature) et la satire de la télévision, mélange les époques et les genres, offre aux spectateurs le bonheur de goûter aux plaisirs du théâtre.

    Grâce notamment à des comédiens talentueux, polymorphes, investis (Vincent Babel, Nicole Bachman, Julie-Kazuko Rahir, Héloïse Chaubert, Pierandré Boo, etc.), mis en scène par l'inventif Cyril Kaiser, qui a récemment séduit le public grâce à un Misanthrope joué à la Fusterie en 2011 et à Calvin, un itinéraire, dans la vieille ville en 2009 et 2010.

    Grâce aussi à la scénographie de Fredy Porras, aux lumières de Liliane Tondellier et au magnifique jardin botanique, que le spectacle permet exceptionnellement d'investir le soir.

    Riche, complexe, nourri, drôle, contrasté, poétique et profond, aux résonances multiples, Rousseau : une promenade permet, à travers diverses évocations, d'approcher la figure du grand auteur, dans une montée en puissance qui se termine par la parole de Rousseau, proférée devant le jardin d'hiver par un Vincent Babel inspiré.

    Ce serait déjà une raison d'y aller. Il y en a bien d'autres, à découvrir sur place.

     

    Spectacle en plein air aux Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève, Place Albert-Thomas (face à l'OMC), du 14 août au 16 septembre 2012

    infos et réservations : http://www.theatredusaulerieur.ch/