•  Aujourd'hui, j'ai allumé la télévision. Non non, je vous assure, ce n'est pas du tout mon genre ! Le soir, de temps à autre, quand je rentre très fatigué, sans énergie, quand le défilement des images est une distraction...
    C'est quand même bizarre que je me sente obligé de me justifier ! C'est dire le niveau de ce qu'on voit en général dans la petite lucarne...
    Bref, je l'ai regardée. Et à onze heures du matin, en plus !
    Par la faute de Pascal Rebetez ! Un ami en littérature. Il écrit des nouvelles, des romans, des récits de voyage, de la poésie (voir ici), il dirige une petite maison d'édition exigeante (D'Autre Part), il lit des textes à la radio. Et comme le numéraire ne vient pas seul, il produit et présente des programmes à la TSR.
    Là, ça s'appelle Vu à la télé. Une émission d'archives, chaque dimanche à 11 heures. Ça vient de commencer. Eh bien, je ne regrette pas ces trente minutes. Il y a dans ces séquences du passé comme un petit air de madeleine proustienne. Les cadrages, les vêtements, les questions, l'attitude des gens, l'ambiance : ça recrée instantanément une époque. On se souvient. J'avais quel âge ? Qu'est-ce que je faisais ? (Il y a un peu la même potentialité dans les chansons d'hier.)
    On a vu des choses un peu surréalistes. Un adepte du végétalisme complètement mollachu qui explique poussivement que cette nourriture réveille l'énergie en soi. Ou le pape de l'instinctothérapie, Guy-Claude Burger, complaisamment interviewé, avec toute son assurance et tout son charme : il faut manger cru et renifler les aliments, l'instinct vous dit s'ils sont bons pour le corps ou pas.
    J'avais un de ses disciples comme prof, quand j'avais 14 ans. On était dans un camp de ski, il déballait chaque soir ses sachets en plastique avec des cacahuètes, des navets, des carottes, des tomates, un gigot cru, un aileron de requin... Il reniflait, croquait, recrachait parfois avec violence. C'était plutôt folklorique.
    Ce qui l'est moins, c'est que Burger prétendait tout guérir avec sa méthode, diabète, leucémie, sclérose en plaques, cancer, etc. et il incitait les malades qui le croyaient à interrompre tout traitement médical. (Sa femme, qui suivait ses injonctions, est morte d'un cancer en 1994.) Il a été condamné pour exercice illégal de la médecine.
    Il affirmait aussi qu'il fallait suivre ses instincts en matière sexuelle et abolir les tabous du viol, de la pédophilie et de l'inceste. Mais comme il l'a reconnu à un de ses procès, « la société n'est pas prête pour entendre cette vérité » (je cite de mémoire). Effectivement. Il a été condamné à 4 ans de prison en Suisse en 78 pour viol d'une fillette de 9 ans, et à 15 ans en France en 2001 pour de nombreux actes pédophiles...